Les deux doigts de la blondinette parcourraient mon ventre nu à la façon d’un petit bonhomme. J’étais couchée sur mon lit, les draps défaits, mon regard se perdant vers le plafond d’un blanc maussade de ma chambre. Seul vestige de ce qui venait de se passer, mon chemisier gisait sur le sol. Mon ventre se soulevait au rythme de ma respiration, mon buste doucement dévoilé par le soutien-gorge noir en dentelle pointait également vers le ciel. Un sourire se fadait doucement de mon visage tandis que je pensais encore et toujours à la même personne. Lucas. L’être pour qui ma vie avait chaviré depuis maintenant plus d’un an. Je l’avais d’abord rencontré au vignoble familial l’été dernier en travaillant pour les Walker. J’y avais aussi vécu une douce aventure avec la jeune Judith, du moins jusqu’à ce que mon regard se pose sur les prunelles azurées de l’homme marié. J’avais dès lors compris que c’était futile de m’attacher en un seul coup d’œil, que d’une façon ou d’une autre je finirais par être détruite devant un tel avenir. Les semaines puis les mois étaient passés et je n’avais fait que rêver d’un jour meilleur avec mon prince comme une adolescente écervelée. Je n’aurais jamais cru l’approcher assez près pour n’avoir ne serait-ce qu’un bref instant son attention. Je ne sais toujours pas aujourd’hui comment j’ai fait pour prendre le courage qu’il me fallait pour aller vers lui. Lennon n’était pas ce genre de fille qui avait peur, elle était la fille courageuse qui avait confiance en elle et qui avait toujours une aura de courage autour d’elle. Mais cette Lennon, elle n’existait tout simplement plus lorsque je me retrouvais près de cet homme. Je ne comprenais pas pourquoi il me déstabilisait jusqu’à ce que je mette enfin le doigt sur ce regard qui me permit de tenter enfin ma chance. Désormais que je l’ai convaincu une fois, je savais déjà que la main était dans le sac. Il me fallait tout simplement renouer avec mon caractère habituel – moins les enfantillages, s’entend – cette force qui me permettait de dégager une force incomparable. J’aimais cet homme d’une façon totalement inconditionnelle. J’aimais un homme marié, un père d’un enfant de six mois. J’étais l’autre. En fait, je n’étais même pas l’autre, car je n’étais pas sa maitresse. J’étais l’amie de sa sœur, celle pour qui il avait craqué une ou deux fois, sans plus. Je souhaitais tout simplement plus, mais je savais que la vie n’est pas aussi facile que l’on veut.

« Tu crois qu’ils vont vraiment être jaloux ?» Je finis enfin par sortir de mes songes et me tourner vers la belle blonde qui me regardait, couchée de travers sur mon lit. Son coude appuyé sur le matelas, elle retenait sa tête en ma direction. Ses doigts pianotaient toujours sur mon ventre plat ce qui fini par me donner des frissons. « J’sais pas, Babsi. Les mecs sont tellement cons parfois.» Un sourire illumina nos deux visages et je finis par éclater de rire devant cette drôle de situation. Un lien hors du commun nous unissait, nous étions amies, amantes et parfois j’avais l’impression de me retrouver avec une vraie sœur. Nous étions tous les deux plutôt pitoyables, je crois que c’était l’ultime lien entre nous deux. Nous aimions d’une façon totalement inconsidérable des hommes qui n’en avaient probablement rien à foutre de nous. Et puis j’étais encore jeune, des idées de la sorte pouvaient encore me sortir de la tête. La jalousie était un point culminant dans les relations et j’espérais tout simplement provoquer Lucas. Ça l’aurait probablement fait avec un mec, mais pour une raison ou une autre j’adorais trop Babsi pour penser que ce que nous faisions n’avait pas de sens. Elle ne connaissait pas ma relation concrète avec Lucas, seuls ma meilleure amie et Ruthie la connaissaient, c’était clairement déjà assez comme ça. Je ne connaissais pas non plus le nom de son chéri, je n’en avais rien à foutre et tant qu’elle gémissait mon nom ça me convenait. Notre relation était innocente, pas du tout vulgaire. Après tout avec mon éducation, je ne pouvais tout simplement pas me mettre à sortir avec n’importe quelle catin de la place. Le dimanche matin, j’allais à l’église et cela depuis ma naissance. Je croyais aux préceptes de l’Église protestante, mais je croyais aussi qu’elle ne devait pas savoir envers qui mon cœur se propulsait. Je soupirai, le secret devenait tellement pesant parfois que je commençais à me demander comment je faisais pour ne pas devenir complètement barjo. Babsi devait aller travailler et j’avais quelque chose à faire de très important, du moins c’était ce que je tentais de me convenir. Un baiser d’au revoir, je me dirigeai vers la demeure du pas si saint Lucas. Je regardai ma montre avant de franchir le passage qui me menait vers sa porte d’entrée. 15h16. Lexie était sortie pour le reste de l’après-midi, comme à tous les dimanches après-midi pour allés faire je ne sais quoi avec ses amies trentenaires. Je me la chassai de la tête et cognai trois petits coups à la porte de l’homme que j’aimais.